Un exploit dans le cadre très minéral du massif de Belledonne
Pour tous ceux qui doutaient de l’abnégation et de la détermination des coureurs de trail, récit épique d’une grande traversée par Fred GRAND, bonne lecture :
« Avis aux traileurs.
A ceux qui apprécient les prairies à vaches => Ne pas venir en Belledonne !
A ceux qui se frustrent de ne pas pouvoir courir sur les sentiers => Ne pas s'engager sur l'Echappée Belle !!
A ceux non rompus à escalader des cols difficiles = Ne pas y aller !!!
A ceux qui n'aiment pas les pierriers, les chaos rocheux, les sentiers peu tracés, " marcher sur le Lune " = S'abstenir !!!!
De la caillasse , de la caillasse , et encore de la caillasse .......
Ultra trail ou trek en montagne, cette course dans le massif de Belledonne, difficilement classable, est redoutée de la part des concurrents qui s'y risquent depuis 10 ans .
Après la Swiss Peak 360 de 2021, avais-je encore l'envie ?
En quête d'un nouveau défi, j'ai finalement décidé de me lancer ce nouveau challenge.
Les 149 kms pour 11300 m de dénivelé, ratio inhabituel, les 55 heures de délais prévus pour effectuer la traversée du sud au nord entre Vizille (38) et Aiguebelle (73), soit une dizaine d'heures de plus qu'un ultra du même calibre, tout devait inciter à la prudence.
Et bien je vous garantis que la réputation de cette épreuve n'est pas galvaudée.
" A côté de ça, les parcours de l'UTMB s'apparentent à une autoroute " Sauf pour la TDS. Ce n'est pas moi qui le dit, mais de nombreux participants.
Dire que notre ami Fred Mato s'était élancé sur cette course en 2016 sans véritable expérience d'un ultra et était allé au bout, il faut vraiment mesurer la valeur de son exploit d'alors.
Ce topo, partage de ma préparation, du vécu durant l'épreuve ( j'ai voulu parler de chaque étape, toutes ont été intenses ), et de la décompression d'après course, a pour ambition de décrire les difficultés techniques d'un grand nombre de passage en altitude ( j'ai joints quelques photos pour se faire une idée ), en particulier le franchissement de plusieurs "vacheries" de cols ( je les nommerai ainsi dans mon topo ), et de mettre en évidence le ou les moments clés qui m'ont permis d'aller au bout et ainsi me procurer cette immense fierté de faire sonner la fameuse cloche d'arrivée.
Ma préparation :
. Il a fallu se remettre en condition suite aux 2 mois de coupure de septembre et octobre 2021, cette longue période de repos indispensable après les 360 bornes de la Swiss Peak.
. Il a fallu au préalable que je me sorte cette course extraordinaire de la tête, je l'ai revécu x fois pendant plusieurs mois. Les honneurs qui ont suivis étaient aussi peu propices à une vraie remise en cause, c'est bien de le dire, çà n'a pas était si simple à faire.
. J'ai maintenu en grande partie la préparation foncière de l'hivers précédent, ça m'avait réussi. Un planning prévisionnel établi sur l'année, des rituels hebdomadaires bien rodés. Heureusement d'autres potes des SGH ou d'ailleurs avaient eux aussi de gros objectifs, on s'est retrouvé souvent les weekends pour de longues séances, avec Fred Mato, Rémi et Dédé entre autres.
. J'ai ajouté des compétitions supplémentaires au planning les mois précédents l'objectif : le trail long " des marcaires" en mai, et "le grand-duc de Chartreuse" en juin, pour évaluer ma préparation et ma motivation, les rappels à l'ordre suite à des résultats un peu mitigés ont été bénéfiques.
. Mesurant la particularité technique du terrain de mon futur objectif, j'ai privilégié des entrainements typés montagne, avec :
- Un séjour en Belledonne en juillet (de sorte de reconnaitre des passages de l'Echappée Belle avec Dédé Villaumié et Fred Mato, ce dernier voulant me montrer la rudesse du parcours). Reconnaissance du secteur de la croix de Belledonne (sommet de 3000 mètres), escalade du col Moretan (extrêmement hard). Des sorties tranquilles ou nous rentrions déjà entamés au bout de 30 bornes, çà promettait pour la course.
- Un séjour dans le Beaufortain début aout (pour continuer à travailler " mon pied montagnard " et à faire du jus en altitude) chez mon amie Valérie DUCOGNON. Plusieurs membres du groupe trail connaissent ce gite, vous savez Valérie, l'ex championne du monde de ski alpinisme, 2 fois vainqueur de la Pierra Menta, mais je n'insiste pas car je crois bien qu'elle n'aime pas qu'on parle trop d'elle.
. Dernier point à signaler, je pense que les nuits très chaudes des dernières semaines avant la course n'ont pas contribuées à une récupération optimale. Mais ça, je ne l'ai su qu'après.
Mon avant course et ma course :
. Les zones de ravitaillement seront peu accessibles, les éventuels accompagnants devront effectuer des belles approches en randonnées. Mes heures de passage aux 2 bases de vie seront surement en soirée ou de nuit, ces circonstances m'inciteront à faire cet ultra sans réelle assistance, çà sera une nouveauté pour moi. Je n'aurai donc pas l'occasion de me plaindre lors des arrêts aux stands. N'est-ce pas Armelle ?
. Comme d'habitude, la semaine qui précède la course est pesante. Cà ne s'arrange pas au fil des années.
. Quelques 700 coureurs inscrits doivent s'élancer en 3 vagues toutes les 30 minutes. Je suis dans la troisième sas de 6h00. Ça me fait en réalité partir 1 heure plus tard que prévu, sans changer les barrières horaires qui vont être plus dures à tenir, c'est une contrainte de plus pour moi qui craint fleurter avec celles-ci. Les stats prédisent déjà que 40 % des 609 partants ne verront pas l'arrivée (Il y a déjà eu de la perte au feu). Il ne va pas falloir trainer, en particulier sur le premier tiers du parcours qui me parait très costaud jusqu'à la première base de vie du Pleynet.
. Mon frangin Jean Louis et ma belle-sœur Pascale m'amènent au départ à Vizille le vendredi matin, la nuit a été courte, je n'arrive pas à m'endormir durant le trajet, j'espère que je ne le regretterai pas les 2 prochaines nuits blanches. Mon filleul Hugo me récupérera à Aiguebelle le dimanche.
. Les conditions météos sont mauvaises lors du départ, je pense à ces 2 mois de canicule durant lesquels je me suis entrainé sous de fortes chaleurs, et bien il tombe des trombes d'eau et ça va durer une bonne partie de la journée. Nous risquons d'avoir froid au-dessus de 1500 m d'altitude, des torrents sont en crues, des secteurs sont annoncés peu praticables, le parcours pourrait évoluer, on nous tiendra informé durant la course. J'essaie de me convaincre que ça fait partie du jeu, c'est la montagne. Ça promet !
. Je prends enfin le départ. Malgré mon bon équipement qui me rassure, je me demande quand même comment vont évoluer mes pieds avec toute cette flotte.
. 3000 mètres de dénivelé sur 30 kilomètres, c'est le début du programme pour atteindre le sommet de la croix de Belledonne. Je suis vite dans le vif du sujet.
. J'ai le plaisir de retrouver le frérot et la belle-sœur au plateaux d'Arselle (1e ravito, 16e km , 1600 m d'altitude), ils font vite quelques photos, ils sont gelés. Malgré des sentiers détrempés, ça va encore bien, il fait jour, les grosses averses ont l'air de se calmer. Je décide d'ôter ma cape de pluie encombrante et de m'équiper du pantalon et de la veste Goretex, je ne vais pas les quitter de sitôt.
. L'organisation nous informe que nous ne monterons pas au sommet de la croix de Belledonne (3000 m d’altitude), mais couperons par le col et le glacier de Freydane (2700 m d’altitude). Sur le coup c'est une petite déception. Ils ne vont pas tout de même nous rogner tous les sommets du fait de ce mauvais temps !
. Les kilomètres défilent et paraissent déjà longs. Je ne vois rien du paysage grandiose qui est autour de moi, c'est dommage et ça devient pénible. Je suis vigilant, des passages sont aériens, des rochers sont instables et ça glisse avec la boue. Je me cogne alors violemment un tibia sur un rocher, j'ai affreusement mal durant plusieurs minutes, mais je dois avancer. Passé les 2000 mètres d'altitude, après le refuge de la Pra (2e ravito, 27e km), je comprends vite pourquoi on ne monte pas au sommet. Le brouillard est dense, des rafales de vent nous font perdre l'équilibre, la concentration est extrême, on oublie tout le reste. J'apprendrai après que les T° ressenties étaient de l'ordre de - 5 ° C.
. Nous redescendons sans trainer vers le refuge Jean Collet (3e ravito, 38e km). Les conditions s'améliorent. Je m'arrête brièvement vers une concurrente qui souffre d'une entorse, entourée de secouristes, peu après j'entends un hélico puis j'aperçois son hélitreuillage. Arrivé au refuge, je croise un autre concurrent avec une cheville énorme en attente d'hélitreuillage lui aussi. Cette course ne serait-elle pas trop dure ? Il faut être lucide. Cà gamberge un peu dans ma tête. Heureusement, il ne pleut plus, je m'accroche à ce que je peux à ce moment-là.
. Le col de la Mine de Fer (41e km) passe plutôt bien. Puis arrive LA première VACHERIE qui ne payait pas de mine sur la carte du profil de course, la Brèche de la roche Fendue (42e km), un des premiers chaos rocheux à passer (On saute de rochers en rochers en espérant ne pas se vautrer à 1 ou 2 km/heure pas plus). Cela va se reproduire x fois durant cette course.
. La descente au ravito suivant du Habert d'Aiguebelle (4e ravito, 47e km) est assez longue, les premiers signes de lassitude se font sentir, les paysages sont bouchés, la zone semble désertique, rien n'incite à l'euphorie. Faisant un premier point, je constate avec satisfaction que j'ai pris un peu d'avance sur les barrières horaires, plus de 3 heures. Par contre, c'est moins sympa, je commence à peu m'alimenter, des débuts de nausées se font sentir. Il va falloir s'accrocher avant que ça passe !
. Se profilent alors 2 cols, le sommet difficile de l'Aigleton qui est LA deuxième VACHERIE ( 49e km ) mais surtout en début de première nuit l'indescriptible col de le Vache (52e km ), LA troisième incroyable VACHERIE. Fred Mato m'avait prévenu, il avait souffert en 2016, il n'avait pas exagéré. Arrivée au col (une sorte de cheminée dans des blocs rocheux instables) c'est un réel soulagement.
. Arrive la plus longue partie descendante du parcours, plus de 1500 mètres négatifs. Je passe de nuit, c'est dommage, par les lacs des 7 Laux pour enfin rejoindre la base du vie du Pleynet (1e base de vie, 64e km, 1430 mètres d'altitude). La fin de cette étape est redoutable mentalement, presque arrivé à la station, et hop nous bifurquons de 180 ° pour s'en éloigner, j'arrive à la base finalement plus 1 heure 30 plus tard, totalement exaspéré. Quel intérêt de faire ça !
Arrivé à la base, je constate avec contrariété avoir perdu un peu de mon avance sur les barrières horaires. Moi qui comptais dormir une heure, ça change tous mes plans. Je décide tout de même de me changer, de surtout protéger mes pieds qui semblent tenir la distance, et m'allonger que 10 minutes (çà sera certainement une erreur). De plus, je m'alimente toujours aussi mal, peu de choses me font envie. Cà ne pourra pas durer ainsi !
. Je repars de ce lieu vers 2h00 du matin avec à peine 2 heures d'avance sur les barrières horaires. La prochaine base de vie de Super Collet se situe vers le 100e kilomètre. J'ai l'info que nous ne monterons pas au col Morétan, le débit d'un torrent n'a pas permis d'y aller, cette portion sera remplacée par je ne sais quoi, je reçois cela comme une bonne nouvelle.
. Un concurrent me rejoint et souhaite rester avec moi, c'est une bonne chose, car je commence à avoir sommeil. Les discussions me tiennent un moment éveillé. C'est étonnant, il a le même timbre de voix qu'une personne que je connais, mais je ne parviens pas à savoir qui. C'est ainsi que nous descendons jusqu'à Fond De France (70e km,1000 mètres d'altitude).
. L'objectif alors est d'atteindre le prochain ravito de Gleyzin. 10 kms à parcourir avec 1000 mètres de D+, la montagne de Tigneux, puis 1000 mètres de D-, portion que j'avais reconnue quelques semaines auparavant et qui m'avais semblé assez tranquille. Finalement, cette ascension se verra être le véritable point de bascule de ma course. J'ai hésité à vous livrer ce moment, mais décide de vous le donner quand même. Le coup de bambou (physique + sommeil) arrive, le mental me lâche, j'ai un besoin absolu que le jour se lève, je ne supporte plus ma frontale. A ce stade, persuadé que l'échec est inévitable, je fini par me laisser aller à penser à l'abandon. Je m'écroule et je m'endors......
Le froid me réveille en sursaut, je réagis, j'ai dû rester allongé 15 ou 20 minutes je pense. En repartant, immédiatement, ça va bien mieux, j'arrive sur une partie à découvert, le jour se lève enfin, la fatigue n'est d'ailleurs plus vraiment là, je constate même ne plus être nauséeux, j'aperçois surtout le sommet. J'aperçois quelques personnes vers le chalet de la Petite Valloire un peu plus loin. Un ravito est là devant moi, dont je ne savais rien. En fait il est destiné aux coureurs du 84 kms partis après nous. Nous pouvons nous servir, je ne me prive pas. Les gars me demandent " c'est toi qui dormait un peu plus bas ? ".
Et bien à partir de ce moment-là (environ 75e km), j'ai brutalement remonté la pente physiquement et mentalement, j'ai commencé à croire en mes chances.
. J'arrive assez vite à Gleyzin ce samedi matin (6e ravito, 80e km), la descente s'est vraiment bien passée, avec 4 heures d'avance sur les barrières horaires. J'ai déjà plus de 24 heures et bien 6500 mètres de dénivelé d'effectué. Un groupe de personne et un coureur qui vient d'abandonner me félicitent, ils disent que j'ai bonne mine. " Toi tu vas au bout me disent ils ". C'est sympa et rassurent. On nous confirme que nous n'irons pas au col Morétan, ni au ravito de Périoule. Le parcours de replis nous fait gagner plusieurs kilomètres et surtout 700 mètres de dénivelé, nous rejoignons directement la 2° base de vie à Super Collet. Cette nouvelle donne très favorable fait que je décide d'un peu plus assurer cette deuxième partie de course. Je décide entre autres de m'octroyer 30 minutes de sommeil à tous les prochains ravitos, car j'aimerais ne pas revivre la prochaine nuit ce que j'ai enduré cette dernière nuit. Surtout dormir, un leitmotiv.
. Après mes 30 minutes de repos, ou je ne dors toujours pas réellement (çà ne se décrète donc pas), je pars confiant pour la prochaine étape d'un peu plus de 15 bornes. J'estime qu'il me reste 24 heures de course, mais zen, petits pas par petits pas, comme au boulot, en technicien méthodique.
. Cette partie du parcours est assez simple techniquement, mais par contre c'est long, c'est long ! C'est à ce moment que je croise un certain Ali, je le reprends dans les montées, il revient dans les descentes, ou inversement. La nuit suivante nous allons unir nos forces, ce sera vraiment un plus. Je remarque, amusé, que le flot des concurrents du 84 kms commencent à nous doubler, çà fait de la compagnie, on parle un peu avec certains, c'est vraiment sympa que de voir tout ce monde, qui ne manque pas de nous féliciter.
. Avec environ 7500 mètres de dénivelé dans les pattes, j'arrive bientôt à la base de vie de Super Collet (2e base de vie, environ 95e km, 1640 mètres d'altitude) ce samedi vers 13h00 avec presque 5 heures d'avance sur les barrières horaires. C'est vraiment incroyable, je vais pouvoir me changer, m'occuper de mes pieds finalement toujours nickel, mais surtout dormir un peu et faire un vrai repas. Tout se passe comme je le souhaite, sauf bien dormir, beaucoup de touristes, de familles, d'accompagnants sont présents, c'est trop bruyant.
. Je repars de cette dernière base de vie vers 14h15. Il me reste 49 kilomètres, près de 3000 mètres de dénivelé positif et un peu plus de 4000 négatifs, il faut arriver avant 12h00 le dimanche, je suis désormais convaincu que ça va le faire. Je sais qu'il ne faut pas trop me laisser envahir par ce sentiment d'euphorie, pourtant je me laisse aller. Je crains payer ce moment plus tard, sortir de ma bulle n'est pas une bonne chose. Je ne savais pas encore à quel point j'allais le regretter !
. La montée au col de Claran (environ 100e km) se fait par de longues pistes aménagées pour le ski, quelle connerie ces montagnes totalement dénaturées, c'est d'un moche! Je constate que je suis bien ballonné, j'ai vraiment trop mangé, tant pis c'est toujours mieux que ces satanées nausées.
. Heureusement les 500 mètres de descente qui suivent se font sur un petit sentier très joli. Mais je vois aussi que nous rentrons dans une zone humide, au bas je constate que je suis boueux de la tête aux pieds. Tant pis !
. Arrive alors le col de l'Arpingon (environ 110e km, 2300 mètres d'altitude), ses presque 1000 mètres de montées, entrecoupées de plusieurs parties descendantes pas marquées sur la carte du profil, vous savez, le genre de truc ou on ne voit jamais la fin. Je ne sais d'ailleurs pas quand j'ai vraiment franchi ce col, sur cette crête finale, passant x fois d'un côté puis de l'autre de l'arête sommitale, la nuit tombante, c'est ça LA quatrième VACHERIE de la course. Et ça recommence dans la descente qui est interminable.
. L'arrivée au ravito de Val Pelouse (8e ravito, environ 115e km) est salvatrice, toujours avec une bonne marge sur les barrières horaires. Je ressens de nouveau une extrême fatigue, je dors debout. Les conséquences ressenties de ce manque de sommeil sont ces sortes de vertiges et une perte sérieuse de coordination, je pose le bâton de droite régulièrement dans le vide, je me plante celui de gauche sur le pied, les pertes d'équilibres deviennent pénibles. Je prends mes 30 minutes de repos. Malgré la fatigue, j'entends non loin une bande de supporters qui gueulent à tue-tête des chants populaires à chaque passage de concurrents, surtout du 84 kms. Je n'ai pas pu véritablement dormir à nouveau. Décidément !
. En repartant pour la prochaine étape, je recroise pour la x -ème fois mon compagnon de route Ali, nous décidons de faire la route ensemble durant cette dernière nuit qui s'annonce compliquée. Je suis très marqué par le manque de sommeil, mais m'aperçois que c'est pire pour lui, nous ne pouvons pas nous laisser aller. Je remarque que quelques-uns de ces propos sont vraiment incohérents, je craints qu'il se soit égaré s'il avait été seul. Cà fini presque par m'amuser. Nous nous tenons donc mutuellement éveillé en parlant. Je constate que mon compère avance encore bien, je prends quelques relais, mais reste le plus souvent derrière, suivre cette silhouette devant moi voilà mon seul but. Nous doublons quelques concurrents du 150 kms et même du 84 kms. Nous arrivons dans une zone avec 3 petites montées / descentes consécutives, des murs de 300 à 400 mètres maximum, avec en visuel au loin des frontales qui se croisent dans tous les sens, c'est troublant. Là se trouve LA cinquième VACHERIE de la course, le col de la Perche (environ 120e km), dignes des pires pentes des pistes noires empruntées lors d'entrainements printaniers, on se retient aux brins d'herbes pour rester en équilibre !
Se profile alors une longue descente de nuit de 1200 mètres négatif qui doit nous mener vers le dernier ravito du Bourget en Huile (9e ravito, environ 130e km). Je chute plusieurs fois, le terrain est mauvais, mais c'est surtout l'inattention. Je décide de laisser filer mon collègue, et malgré la faible distance qui reste pour atteindre mon but : le lit de camps qui m'attend, je décide de faire une somme par terre (la fameuse micro sieste) par sécurité, je n'arrive plus à lutter. Je suppose que j'ai dormi 10 à 15 minutes. Vous constaterez comme moi que c'est à même le sol que je dors le mieux, c'est dingue !
. J'arrive au dernier ravito le dimanche matin un peu avant 4h00 avec plus de 4 heures d'avance sur les barrières horaires. Impatient, je m'installe sur le premier lit picot que je vois, épuisé. Vous n'allez pas me croire, et bien je n'ai pas dormi, certainement trop bien installé. On peut en sourire maintenant.
. Me voilà repartit pour cette dernière étape d'un peu plus de 15 kms composés de 500 mètres de dénivelé positif pour atteindre le fort de Montgilbert (je m'imagine bien voir un immense fort de Vauban), puis une toute dernière descente de 1200 mètres. Ce dernier redémarrage est très décidé, je me sens bien, je m'aperçois que j'ai envie de courir pour vite en finir. Mais je reste tranquille.
. Cette dernière montée en pente douce est finalement encore interminable. Je crains y avoir perdu un temps fou. Mais où sont les VACHERIES de début de course ? J'arrive sur un grand plateau au-dessus, je m'apercevrais après que je n'ai pas vu le moindre fort.
. J'entame la dernière descente. Je me trouve relativement frais. J'ai alors besoin de faire un point rapide de la situation. Un sentiment d'aboutissement et de fierté immense m'étreint. Une belle émotion me prend aux tripes. J'ai l'impression de vivre une fin de cycle, le devoir accompli, heureux de toutes ces années jalonnées de résultats incroyables. Je me dis aussi que c'est raisonnablement la dernière fois, là est le plus fort moment. Je décide alors de courir jusqu'au bout, atteindre les faubourgs d'Aiguebelle, passer la ligne ainsi.
. Je passe l'arche vers 8h40 le dimanche matin. Je ne manque pas de faire sonner vigoureusement la fameuse cloche d'arrivée.
C'est fait. INCROYABLE. Je décide de trainer un bon moment vers la zone d'arrivée pour savourer ce résultat exceptionnel. Je mesure, étonné, mon périple de ces 50 dernières heures.
Cette Echappée Belle restera comme la plus dure mais la plus enrichissante de toute.
L'après course :
L'état d'euphorique dure tout le dimanche. J'en profite autant que possible avec quelques concurrents, puis avec ma famille.
Je sais que les semaines qui arrivent vont être particulières, le retour sur terre va être difficile à vivre : Fatigue, décompression, manque d'envie. C'est arrivé très vite.
L'écriture de ce topo, même s'il fait revivre intensément quelques moments difficiles, est une étape obligée pour moi, c'est avant tout un grand moment, il va me prendre une dizaine d'heures.
Enfin, un immense merci à Fred Mato, pour tout, il comprendra.
Bonne lecture.
Fred GRAND
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